Saturday, November 2, 2013

LA PERTE DU CENTRE


Tout le remue-ménage(parfaitement justifié) autour des écoutes de la NSA et de ses alliés (N'oublions pas ses alliés, économiques, politiques ou culturels - ils sont nombreux) me suprend cependant un peu, non pas par l'hypocrisie généralisée de nos gouvernants, qui étaient, bien entendu, au courant et cherchent à se cacher le sexe avec la toute petite main mutilée de la "démocratie", mais par la superficialité de l'analyse qu'on en fait.
Cette surveillance globalisée, au nom d'une "guerre contre le terrorisme" qui pourrait tout aussi bien s'appeler "guerre permanente" - comme la "Révolution permanente a servi de slogan à une autre forme de totalitarisme - peut en effet aussi être lue comme un symptôme de faiblesse, de la réalisation terrifiée du monde occidental que nous ne sommes plus au"centre" - et quie non seulement nous ne sommes plus au centre, mais que nous avoins été balancés carrément à la periphérie d'un monde qui n'a, justement, plus de "centre."
L'incapacité radicale de transformer notre pensée et notre système conduit à une crispation réactionnaire (littéralement) qui se traduit par l'hypertrophie du secret, de la surveillance et de marqueurs épiustémologiques obsolètes et inneficaces. Ainsi, au lieu de revoir complètement notre mode de pensée, nous nous accrochons à des formules qui n'ont jamais marché, mais que la déformation du temps fait passer pour historiquement prouvées et viables (Keynes contre Friedmann, par exemple)
Il me semble donc qu'il nous faut radicaliser notre mode de pensée, le rendre à nouveau "critique", c'est à dire qu'il faut à la fois "se mettre en danger" que "mettre en danger"au travers de nouveaux modèles analytiques "ouverts". Puisque nous sommes à la marge, il faut penser de la marge, non pas vers le centre - qui n'existe plus, mais vers les autres connections du rhizome, pour reprendre Deleuze. Cela passe, bien entendu, vers une individualisation forte de la pensée, mais une individualisation généreuse et non pas au service d'une pensée axée sur un profit inégalement réparti.
Une pensée libre, mais consciente et liée à la liberté de celles des autres. Comme le disait Bakounine, "Je ne suis vraiment libre que par la liberté des autres."
Mais cette liberté reste à définir - et à discuter. Il faut la "réfléchir" à nouveau, car l'oppression a changé de forme. Mais il ne faut pas oublier non plus que cette oppression a bel et bien une forme. Le génie de la nouvelle pensée totalitaire est de faire croire que les problèmes sont trop importants pour être réglés de manière démocratiques et trop complexes pour être résolus tout court. Mais non, il y a des causes à ces problèmes, et l'ironie veut que la démocratie (encore un mot auquel il faut réfléchir) dans nos pays soit appelée pour justifier l'inoculation des virus totalitaires qui la rongent.
Bakounine (encore lui) disait qu'il était stupide de blâmer la société, parce que c'était ce qui nous constituait - parcontre, il fallait s'attaquer à ceux qui se servaient de la société pour en profiter et opprimer les autres. Par contre, aujourd'hui, tout ce travail d'identification réel - et non symbolique- reste à faire, pas seulement dans la sphère politique (Wikileaks, Snowden et Manning nous montrent une des voies possibles), mais aussi dans les modèles de pensées que nous utilisons pour réfléchir.
La culture, sa définition, son accessibilité en sont des exemples parfait. Où en sommes-nous? Propagande par l'art? Expression contrôlée? Opium du peuple? En tant qu'intellectuel(le)s. nous avons une responsabilité énorme - mjais où sont les vrais débats? Les vraies réflexions? Le désir de les partager? Les moyens de les partager?
Si nous voulons continuer (ou commencer, pour certain(e)s) à avoir une place, même relative, dans le grand chambardement qui s'annonce, il va falloir absolument repenser intégralement nos cadres et modèles et les adapter á la marge. Autrement nous allons perdre toute légitimité de pensée. Et sortir du champ du dialogue avec le reste du monde.